Favoriser le rapprochement interculturel et le partenariat

Il y a un quart de siècle que Nora Solervicens vit au Québec. Elle y est arrivée, fuyant la dictature de Augusto Pinochet au Chili, avec sa fille Lorena qui avait un an et demi en 1977 alors que son fils David est natif de Montréal. Déjà très active au sein de la ville de Concepción (Chili) où elle a obtenu un diplôme en travail social à l’université, Nora Solervicens avait entrepris au milieu des années soixante-dix une série de choix et mis en action avec des étudiants de diverses disciplines des programmes d’information et de formation au profit des femmes démunies de la ville de Concepción. La base de l’engagement social est en place, elle fait du terrain dans les quartiers les moins nantis, apporte une aide précieuse dans les bidonvilles, combat le taux élevé de mortalité infantile et permet aux citoyens de se prendre en main en constituant des comités d’hygiène et de nutrition. Les études sont tout de suite utiles, elle effectue du counseling individuel auprès des femmes et, avec d’autres collègues, fait du soutien psychosocial.

Dès son arrivée au Québec, Nora Solervicens rejoint le milieu communautaire et participe activement aux différentes activités de solidarité, donne bénévolement des cours d’espagnol et de connaissance de la culture sud-américaine à la Maison culturelle Québec-Amérique latine. Afin de pouvoir travailler dans son domaine d’activité, elle doit, comme beaucoup de personnes immigrantes, reprendre une partie de ses études. Tout en suivant le programme en service social à l’Université de Montréal, elle travaille à l’organisme Au bas de l’échelle qui défend les droits des travailleuses et travailleurs non syndiqués. Elle est engagée dans les dossiers relatifs aux femmes tels que : le retrait préventif pour les femmes enceintes, le harcèlement sexuel au travail et les conditions de travail.

En 1986, elle accepte le poste, comme elle le dit, de directrice générale de l’Hirondelle, un organisme qui offre des services aux personnes immigrantes : services de soutien psychosocial, des cours de français, du dépannage alimentaire. Un virage complet s’opère dans sa vie, elle va consacrer désormais à l’Hirondelle son talent en organisation et en planification et développer des services et des programmes selon quatre axes d’intervention : accueil, établissement, adaptation; soutien à l’insertion en emploi; formation professionnelle et rapprochement interculturel. En 1989, Nora Solervicens obtient sa maîtrise en service social de l’Université de Montréal. Son mémoire est intitulé : Les travailleurs non-syndiqués au Québec et leurs conditions de travail.

Désormais, Nora Solervicens est, à l’image d’un chef d’orchestre, cohérente, méthodique et chef de file qui donne le ton, marque de générosité et d’engagement social chaque participation à de nombreux regroupements de solidarité : le Comité des Femmes, la Table de concertation des organismes au service des réfugiés et immigrants, le Regroupement des organismes au service des nouveaux arrivants (ROSNA), le Regroupement des organismes multiethniques pour le logement. En 1996, elle devient membre du Comité aviseur de Centraide sur l’accès aux services communautaires pour les personnes immigrantes. En 2001, elle a été déléguée de la Table de concertation des organismes au service des réfugiés et immigrants à la Conférence des Amériques en préparation à la Conférence mondiale sur le racisme en Afrique du Sud (Durban).

Qu’est ce qui fait vivre Nora Solervicens, quelle est sa motivation ? La motivation de mon action et de mes choix est orientée indéniablement vers les projets sociaux, économiques et humanitaires puisqu’ils contribuent concrètement et quotidiennement à assurer l’égalité des chances aux personnes d’origines diverses. Nous devons favoriser une approche personnalisée qui puisse répondre aux besoins de chaque personne. Il faut pouvoir donner à chacun les moyens qui lui permettront de développer son autonomie et sa capacité d’agir sur sa propre situation et sur son nouveau milieu de vie. De cette façon, chacun pourra développer son potentiel et contribuer activement au développement social, économique et culturel du Québec

Il est difficile de dissocier Nora Solervicens de l’organisme l’Hirondelle. Parler de ses réalisations serait faire le bilan de cet organisme dont le rayonnement est important au sein de notre société dans le milieu des relations interculturelles. Ne manquons pas d’attirer l’attention sur une situation qui reflète l’approche de cette femme qui a réussi à vivre en harmonie avec ses convictions. Impliquée elle-même dans la coopérative d’habitation où elle demeure, elle participe en 1999 au projet de partenariat avec deux autres organismes du quartier pour fonder Les Loges du Mile End. L’avenir des liens entre la majorité et ses communautés d’appartenance trouve une application à Montréal : Montréal est une ville fascinante dans laquelle il est possible de conjuguer appartenance et diversité. Cependant, l’établissement d’une société plurielle permettant à chacun de ses citoyens de s’épanouir pleinement exige des gestes permanents d’inclusion à tous les niveaux et dans tous les sens.