« L’équité sociale, le rejet de la violence et le souci d’assurer à la société des institutions solides. Ce sont les valeurs qui m’animent . »

Michel Agnaïeff est à coup sûr une des personnalités remarquables du Québec. Il est resté fidèle à ses engagements depuis quarante ans, serein, perspicace et philosophe : « De plus, même si nous tentons de maîtriser les circonstances ou les événements qui marquent nos vies, il faut modestement reconnaître qu’ils contribuent aussi à faire de nous ce que nous sommes. Prétendre donc qu’une seule motivation m’a guidé dans toutes mes actions serait pour le moins excessif ». Souvent il a été sollicité par les quartiers généraux des partis politiques, ses choix, ses engagements sont ceux d’une personne qui croit au progrès social en améliorant le sort du plus grand nombre : « Cela étant dit, j’ai beaucoup consacré de mon temps et de mes énergies à l’action sociale et, pendant un relativement court laps de temps, même à l’action politique. J’ai été guidé en cela par une volonté assez constante de travailler au progrès social ».

Né au Caire, Égypte, le 16 septembre 1939, Michel Agnaïeff est d’origine russe. Il a immigré au Canada en 1966 et s’est établi au Québec où il s’est engagé aussitôt dans l’enseignement à la Commission des écoles catholique de Montréal (devenue la CSDM).

De 1971 à 1998, il a assumé des fonctions politiques et administratives de haut niveau à la Centrale de l’enseignement du Québec (CEQ). Il a ainsi apporté une contribution importante à la transformation de l’ancienne Corporation des enseignants en une organisation moderne, à la fois active sur le plan social et bien outillée sur le plan des services directs à ses membres. Pendant vingt ans, de 1976 à 1996, il en a été le directeur général. Auparavant, de 1972 à 1976, il avait dirigé un service qui regroupait les communications, la recherche et l’action sociopolitique ainsi que la condition féminine. « Les circonstances de la vie et mes choix personnels m’ayant amené à œuvrer au sein du mouvement syndical, j’ai pu ainsi bénéficier de ce privilège exceptionnel d’être en mesure d’harmoniser pendant longtemps vie professionnelle et engagement social. Pendant toute cette période de ma vie professionnelle et plus tard, au fil des différents engagements sociaux qui ont suivi ma prise de retraite, j’ai le sentiment que certaines valeurs ont toujours joué un rôle déterminant dans mes choix. Je veux ainsi parler d’abord du souci de l’équité sociale, ensuite celui du rejet de la violence sous toutes ses formes et enfin le souci d’assurer à la société civile des institutions solides capables d’exercer une influence déterminante ».

À titre de responsable du dossier des relations internationales de la Centrale, il a été à l’origine du développement de liens de collaboration internationale et d’un programme de coopération. Il a été d’ailleurs jusqu’en 1997 le secrétaire général du Comité syndical francophone de l’éducation et de la formation. Ce comité est maintenant à la tête d’un réseau d’une quarantaine d’organisations syndicales et professionnelles provenant de quelque 30 pays appartenant à la francophonie. Le Comité est reconnu comme organisme de collaboration et de concertation par l’Agence internationale de la francophonie..

Au cours des années 1970, dans le cadre de ses fonctions à la Centrale, il a été très impliqué dans le développement du mouvement de la paix au Québec. Au plan plus personnel, il a aussi participé à différentes tentatives d’unification des forces de gauche au Québec avant de joindre, au milieu des années 1980, les rangs du Nouveau Parti Démocratique. Il a déjà été le président associé du Nouveau Parti Démocratique du Canada et son principal porte-parole au Québec. En résumé il explique une des réalisations dont il est fier : « ma contribution à la relance de la Commission canadienne pour l’UNESCO et à la réforme de l’UNESCO, où j’ai mené à bien les travaux d’un groupe international de haut niveau chargé de baliser l’action de cette organisation au 21e siècle. J’avoue avoir tiré une très grande satisfaction du fait que le cœur de l’orientation stratégique de l’UNESCO est maintenant l’humanisation de la mondialisation. Ce fût une belle façon de fermer la boucle entre mes préoccupations locales et internationales ».

Michel Agnaïeff est présentement étroitement associé à la préparation du projet de politique du patrimoine de la ville de Montréal. Il a été également au cœur de la préparation de la politique culturelle de cette dernière. Il assume aussi le secrétariat général du Groupe d’action sur les politiques en apprentissage et éducation de la Commission sur la mondialisation créée par le State of the World Forum. Il est important de revenir sur une des caractéristiques de ses convictions, il croit en l’avenir de Montréal comme grande ville : « l’élaboration d’un énoncé de politique culturelle pour Montréal qui, me semble-t-il, tient bien compte de son potentiel extraordinaire de métropole culturelle de stature internationale et du dynamisme de ses milieux créatifs ».

Le réalisme de Michel Agnaïeff est empreint d’espoir quant à l’avenir des liens qui se tissent entre nous, quelque soit notre origine : « le danger de multiples solitudes nous guette toujours. C’est le lot du Québec à cause de son histoire, mais aussi celui de toutes les métropoles modernes comme Montréal. Nous l’avons assez bien évité jusqu’ici, mais il ne sera écarté définitivement que dans la mesure où le sentiment d’être véritablement des « parties prenantes » dans le devenir de cette province s’instaurera chez tous. C’est le développement de ce sentiment qui nous dira si, oui ou non, nous avons bien relevé le défi formidable de la diversité culturelle vécue comme un enrichissement collectif ».